تحقيق فرنسي "مفصل" يكشف تورط سفير لبنان لدى فرنسا رامي عدوان "بالاغتصاب"!

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Friday, June 2, 2023

كشفت الصحافية Sarah Brethes في جريدة MEDIAPART عن استعداد شابتان لرفع دعوة أمام ضد رامي عدوان وهو سفير لبنان في فرنسا منذ 2017 بتهمة الاغتصاب التحرش و اعتمادة على العنف المفرط من أجل الحصول على ملاذات جنسية.

أما عن أبرز ما جاء في التحقيق فهو، "نفي عدوان أي اتهام بالعدوان" "لفظي ، أخلاقي ، جنسي" وعدم تقديمه رد للشرطة والمحاكم ، حيث يمنحه وضعه الدبلوماسي حصانة كاملة وغير قابلة للانتهاك".

وكشف التحقيق أن، "القضية بدات في صيف عام 2020. الساعة العاشرة مساءً تقريبًا عندما دخلت شابة آفا * باب مركز شرطة الدائرة الخامسة في باريس لأول مرة في 26 أغسطس\اب. تبلغ من العمر 28 عامًا وتعمل لمدة ثلاث سنوات في السفارة اللبنانية، حيث تنوي آفا تقديم شكوى بشأن المضايقات الأخلاقية والعنف المتعمد ضد رئيسها المعروف بأنه قريب من الرئيس اللبناني آنذاك ميشال عون".

وأضافت الصخفية، "الحقيقة أن الشابة تريد تقديم شكوى: اغتصاب، بحسب روايتها للوقائع ، وهي في الطابق العلوي من السفار ، في الشقق الخاصة للسفير ، في مايو-ايار. 17 ، 2020. بعد غداء مع موظف آخر ، كان السفير قد فرض عليه علاقة جنسية بالعنف. وقالت للشرطة "صرخت من الألم قائلا ذات مرة لا ، توقف ، وبدأت أبكي وأرتجف". وهي تزود السلطات بمبادلاتهم على WhatsApp ، لا سيما في المساء.

وتابعت، "رامي عدوان لن يرد بشأن هذه الاتهامات. وهو يؤكد اليوم أن العلاقة كانت "بالتراضي". وقال: "شكوى الاغتصاب هذه، تأتي بعد أكثر من عامين".

وفيما يلي نص المقال كاملا باللغة الفرنسية:

VIOLENCES SEXISTES ET SEXUELLES - ENQUÊTE
Accusé de viol et de violences, l’ambassadeur du Liban va échapper à la justice

2 juin 2023 | Par Sarah Brethes
Deux jeunes femmes ont déposé plainte pour dénoncer des faits de viol et de graves violences de la part du diplomate, en poste à Paris depuis 2017. Celui-ci dément ces accusations. En raison de son immunité, il ne peut être poursuivi en France.

Mise en garde
Cet article fait état de violences sexuelles.
L’une l’accuse de l’avoir frappée à la tête avec un presse-papier en marbre et de l’avoir violée. Une seconde d’avoir tenté de la renverser en voiture et de l’avoir étouffée dans son matelas. Toutes deux évoquent des violences infligées pendant plusieurs années par celui avec lequel elles entretenaient une relation intime. L’homme qu’elles accusent s’appelle Rami Adwan, il est ambassadeur du Liban en France depuis 2017 et « conteste toute accusation d’agression » « verbale, morale, sexuelle ». Il n’aura de toute façon pas à en répondre devant la police et la justice, son statut diplomatique lui offrant une immunité totale et inviolable.

L’affaire débute à l’été 2020. Il est presque 22 heures quand Ava* passe pour la première fois la porte du commissariat du Ve arrondissement à Paris, le 26 août. Elle a 28 ans et travaille depuis trois ans à l’ambassade du Liban, au sein du cabinet de Rami Adwan, un diplomate de 47 ans qui a fait ses classes à l’École nationale d’administration en même temps qu’Emmanuel Macron.

Ava a l’intention de déposer une main courante pour harcèlement moral et violences volontaires contre son supérieur, réputé proche du président libanais d’alors, Michel Aoun. Elle expose au gardien de la paix son quotidien depuis l’arrivée à Paris de l’ambassadeur, en septembre 2017 : les « insultes » (« pute, lâche-moi la bite »), les « humiliations », les « colères ».

Elle relate ensuite plusieurs épisodes. Un premier en octobre 2018, où il aurait, selon la déposition consultée par Mediapart, « lancé un cendrier dans sa direction » devant d’autres employé·es. Au printemps 2019, dans sa voiture, elle affirme qu’il lui a donné « trois fortes claques sur les jambes » car elle s’était permis de parler au chauffeur alors que le diplomate était au téléphone.

Interrogé sur ces points, son employeur affirme n’« avoir jamais levé la main » sur la jeune femme et dénonce « des accusations qui n’ont aucun sens ». Il évoque une relation qui se serait « achevée dans un climat très conflictuel » et affirme que la jeune femme aurait « tenté d’utiliser » leur relation « pour renforcer sa position au sein de l’ambassade ».


Rami Adwan, ambassadeur du Liban en France depuis 2017. ©️ Photo illustration Sébastien Calvet / Mediapart
Mais la violence serait encore montée d’un cran dans son bureau l’après-midi du 26 août 2020 : après avoir critiqué son travail, l’ambassadeur aurait pris le sac à main de la jeune femme avant de jeter ses affaires par la fenêtre, selon le récit de cette Franco-Libanaise. Elle s’empare alors de son téléphone et menace de le jeter. « Cela l’a rendu fou de rage, il m’a mis deux coups de pied au niveau des genoux, m’a maintenu les poignets et poussée vers la fenêtre, décrit-elle au policier. Ensuite, M. Adwan a pris dans sa main droite une boule en marbre servant de presse-papier et m’a frappée à l’arrière de la tête. J’ai été sonnée, j’étais choquée, j’avais envie de vomir. »

Elle se rend aux urgences parisiennes de l’Hôtel-Dieu, où un médecin lui délivre un certificat faisant état d’un « hématome occipital » et de « lésions érythémateuses au niveau des deux poignets », versé au dossier. Selon sa version, le policier refuse d’enregistrer sa main courante (interdite depuis 2021 dans le cadre des violences conjugales) et lui propose de déposer plainte. Elle refuse, déclarant « ne pas vouloir causer de tort à son pays ni briser la vie de cet homme », avec lequel elle entretient une relation intime secrète – ce dernier étant marié et père de famille.

Le procès-verbal de son audition est enregistré. Elle retourne travailler quelques jours plus tard.

L’ambassadeur livre une tout autre version de la scène : « Elle s’est mise en colère à l’occasion de je ne sais quel sujet. Elle s’est mise à hurler, à jeter par terre ce qui se trouvait sur mon bureau, ainsi que mon téléphone après l’avoir saisi, assure-t-il. Elle a vociféré, menacé. Je lui ai hurlé de partir. Nous nous sommes poussés, il y a eu des cris, des gestes brusques mais ni coups ni jets d’objets. »

Été 2022. Ava franchit une seconde fois la porte du commissariat du Ve arrondissement. Entre-temps, un policier l’a rappelée pour lui demander si elle ne souhaitait toujours pas déposer plainte. Cette fois, elle est décidée. En avril 2021, elle a annoncé à l’ambassadeur qu’elle quittait son poste. Selon son témoignage, ce dernier aurait une nouvelle fois jeté ses affaires par la fenêtre, avant de la traîner par les cheveux puis de la frapper avec un cintre – une scène confirmée par un témoignage recueilli par Mediapart, et encore une fois démentie par Rami Adwan : « Il n’y a eu ni coup ni cintre », affirme-t-il.

Mais c’est pour un autre fait que la jeune femme veut porter plainte : un viol, survenu, selon sa version des faits, au dernier étage de l’ambassade, dans les appartements privés de l’ambassadeur, le 17 mai 2020. Après un déjeuner avec un autre employé, l’ambassadeur lui aurait imposé par la violence et la surprise un rapport sexuel. « J’ai poussé un cri de douleur en disant une fois : “Non, arrête !”, et je me suis mise pleurer et trembler », déclare-t-elle à la police. Elle fournit aux autorités leurs échanges WhatsApp, notamment le soir et le lendemain des faits, où elle lui reproche explicitement de l’avoir violée.

Rami Adwan ne lui répondra jamais par écrit sur ces accusations. Il assure aujourd’hui que la relation était « consentie ». « Cette plainte pour viol qui intervient plus de deux ans après les faits […] interroge quant à la sincérité de sa démarche », dit-il.

Roulé sur le pied en voiture

Mais Ava n’est pas la seule jeune femme à s’être plainte aux autorités françaises. Le 21 février 2023, une de ses ex-collègues, Gabrielle, a elle aussi déposé plainte pour violences volontaires contre Rami Adwan. Cette étudiante libanaise, arrivée seule en France en 2018 à l’âge de 23 ans, a travaillé pendant quatre ans à l’ambassade, jusqu’à fin 2022, comme stagiaire puis employée au cabinet. Elle aussi a eu une relation intime avec son supérieur, qu’elle qualifie face aux enquêteurs de la police judiciaire de « relation d’emprise », fondée sur la « peur » et « un système de punitions et de récompenses », dépeignant comme Ava un tableau associant harcèlement moral, violences psychologiques et des déclarations d’amour qui peuvent prendre la forme de plusieurs dizaines de courriels dans la même journée.

À l’instar de son ex-collègue, Gabrielle affirme aussi avoir été victime de violences physiques. Un soir de mai 2022, elle raconte qu’après le bal de Polytechnique à l’Opéra de Paris, une dispute aurait éclaté et que Rami Adwan l’aurait frappée à plusieurs reprises au visage. Des photos, qui figurent dans l’enquête judiciaire ouverte par le parquet de Paris, montrent son visage écorché et tuméfié au niveau de la lèvre et du nez.

« Pourquoi ne pas avoir déposé plainte ? », lui demande le policier. « Je n’ai pas osé, je l’aimais trop », répond la jeune femme, qui évoque aussi des rapports sexuels non consentis et de nombreux épisodes de violences, où elle aurait été « traînée par les cheveux au sol » ou encore « enfermée » dans une pièce.

Elle décrit ensuite deux scènes d’une grande violence. Une première en septembre 2022, où elle accompagne l’ambassadeur au Forum pour la paix, à Caen (Calvados). Après un déjeuner dans un restaurant, il l’aurait fait monter dans sa voiture, où il l’aurait « frappée sur la tête » après qu’elle eut refusé un rapport sexuel. Elle sort du véhicule et appelle le 17. Rami Adwan lui aurait dit : « Tu veux partir ? Je vais te tuer », avant de faire marche arrière dans sa direction. « Je vois la voiture qui va me rentrer dedans, je me décale et les roues sont passées sur mes pieds, je suis tombée », dit-elle aux enquêteurs. « Quand on s’est réveillés le lendemain, il parlait d’un accident ». « Il m’a amenée chez le radiologue, il n’y avait pas fracture », ajoute-t-elle.

Là encore, l’ambassadeur livre un autre récit : il affirme que « la voiture a dérapé lorsqu’[il] a freiné pour [s]’arrêter à sa hauteur ». « Je n’ai jamais cherché à l’écraser et le véhicule ne l’a pas touchée. Elle a effectivement dit qu’elle avait eu mal aux pieds en glissant, je l’ai donc accompagnée les jours suivants chez le radiologue pour faire les vérifications nécessaires », dit-il.

C’est, selon le témoignage de Gabrielle, une autre soirée qui la pousse à quitter l’ambassade et à mettre un terme à sa relation avec Rami Adwan. « La fois où j’ai eu le plus peur de ma vie, c’est le 27 décembre 2022 », dit-elle. L’ambassadeur serait arrivé dans la nuit à son domicile parisien, alcoolisé, pour avoir un rapport sexuel, qu’elle refuse. « Il me prend avec une main par la nuque et il m’enfonce le visage face dans le lit, et là je n’arrive plus à respirer. Il a fini par enlever sa main, il aurait fallu cinq secondes de plus pour mourir », affirme-t-elle. En partant, il lui aurait dit : « Ne va surtout pas dire que je t’ai asphyxiée. »

En janvier dernier, sa psychologue la pousse à déposer une main courante et l’accompagne à la police judiciaire.

« Je suis arrivé chez elle ce soir-là, et [elle] m’a immédiatement reproché d’avoir une relation avec une autre femme. Il n’a jamais été question de rapport sexuel ce soir-là dans mon souvenir, assure Rami Adwan. Elle m’a craché au visage et a tenté de m’étrangler, en hurlant. Je l’ai repoussée. Je n’ai jamais essayé de l’asphyxier. »

Un précédent signalement à La Haye

Une des voisines de Gabrielle, sollicitée par Mediapart et également interrogée par la police, affirme avoir été réveillée cette nuit-là vers deux heures par une « dispute », puis avoir entendu des « cris étouffés ». Elle dit avoir identifié l’ambassadeur du Liban, qu’elle a croisé plusieurs fois.

Gabrielle comme Ava affirment que d’autres employé·es de l’ambassade subissent les foudres de l’ambassadeur. La première raconte l’avoir entendu traiter de « pute » une cadre, avant de lui lancer : « Tu ne reviendras pas ici tant que tu n’auras pas rampé à quatre pattes comme une chienne. »

« Je suis passionné par ma mission et je peux être grossier », reconnaît l’ambassadeur.

Interrogé par Mediapart, un ancien salarié raconte aussi le cas d’une employée du consulat qu’il aurait contrainte à travailler debout, sans chaise ni bureau. « Je respecte mes collaborateurs et leur travail », oppose l’ambassadeur, qui dément l’existence de cet épisode.

Selon plusieurs articles de la presse libanaise, Rami Adwan aurait par le passé déjà fait l’objet d’au moins un signalement pour agression sexuelle, quand il était en poste comme diplomate à La Haye aux Pays-Bas, au début des années 2010. Un article du journal libanais Al-Akhbar parle ainsi du « tollé » qu’aurait suscité dans le milieu diplomatique sa nomination à Paris, évoquant un « rapport secret », qui a circulé au ministère des affaires étrangères libanais. Ce rapport « contenait des accusations sur des affaires, dont certaines pour des délits sexuels », avance le journal, citant un chapitre intitulé « le comportement de M. Adwan en Hollande ».

« Il s’agit d’une tentative de règlement de comptes politique alors que je venais d’être nommé directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères libanais, un article de presse anonyme, qui n’a eu aucune suite. Je n’ai pas été rappelé au Liban », affirme l’ambassadeur.

Le ministère des affaires étrangères libanais, où Rami Adwan a exercé en tant que directeur de cabinet, ne fait pas de commentaire. Un porte-parole a indiqué à Mediapart ne pas avoir été avisé de la procédure judiciaire à Paris.

Que va devenir cette enquête judiciaire pour viol et violences volontaires qui vise un homme qui jouit d’une immunité diplomatique « inviolable » et « complète », selon les textes réglementaires découlant de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques de 1961 ? Les textes disent clairement qu’un ambassadeur ne peut être « soumis à aucune forme d’arrestation et de détention », et ne peut être poursuivi devant la juridiction du pays dans lequel il officie. Sauf si l’État d’origine décide de lever son immunité.

Le parquet de Paris nous a indiqué « ne pas être en mesure de répondre pour le moment » sur les suites qui seront données à cette affaire.

La balle est dans le camp du ministère des affaires étrangères, qui peut déclarer un diplomate persona non grata sur son territoire. L’État d’origine est alors tenu de rappeler la personne indésirable et de s’assurer de son départ effectif du territoire. Pour l’heure, le ministère des affaires étrangères indique n’avoir « aucun élément sur cette affaire dont est saisie la justice et qui est couverte par le secret de l’enquête ».